Bien que possédant un physique correct sans être faramineux, c'est bien sa détermination qui extrait le charognard de la masse. Élevé à la dure depuis sa plus tendre enfance, avide de réussite, possédant une ambition sans fin, Aslan est une illustration possible du proverbe « La fin justifie les moyens. ». Égoïste sur les bords, disposant d'un code d'honneur qui lui est propre, l'homme à la morale grise est motivé par des causes sombres, héritées d'une existence ayant réclamé des choix lourds en conséquences.
Parvenant difficilement à refréner une impulsivité tenace, la verve de l’épéiste ne connaît nulles restrictions. Jamais dans sa poche, sa baveuse acerbe adore les piques titillant l'ego, tout en plaidant ensuite une candeur ironique « C'est pas d'ma faute si l'gus est incapable d'garder sa prop' femme dans son pieu et qu'la caserne lui passe d'ssus. Moi j'relaie juste l'info. »
Cependant, le bouffon engoncé dans une armure en cuir bouillie n'incarne pas que le pitre raté à deux sous. Sous ses airs d'amuseurs de la galerie se dissimule un farouche rancunier, assoiffé de trébuchante. Animé par un désir sombre de punir ceux que sa folie vengeresse à désigner comme ses véritables ennemies, ne reculant devant aucune bassesse pour voir sa tâche accomplie. Nulle gloire dans la vertu, seul le résultat importe et désigne la valeur d'un homme, à ses yeux. Loin d'épouser les dogmes religieux sans pour autant les rejetés ardemment, il hausse simplement les épaules quand on lui évoque les notions d'ordres et de chaos, préférant jongler secrètement entre les deux, préférant l'un à l'autre selon la situation, et selon l'issue qui lui est la plus favorable. Le chaos est une arme, comme l'ordre. Qu'importe la cause, sa survie prévaut.
Guidé par une volonté morbide, motivé par sa vendetta raciale et sociale, dénué de tout patriotisme, Aslan ne voue allégeance qu'à une seule cause, la sienne.
*
Diable de beau parleur, il... C'est faux. Aslan n'est pas l'archétype de la gueule d'ange. À part son nez qu'il s'évertue de conserver en bon état, sa frimousse est banale. Une barbe mal taillée encerclant un visage joyeux avec en son sommet une crinière rarement nouée, des iris d'un brun classique, il n'est qu'une âme parmi des milliers, illustrant le commun, le banal.
Musclée par les aléas d'une existence ne conservant que les plus résilients, le charognard culminant au mètre quatre-vingt-dix sur la pointe des pieds est robuste, doté d'épaules larges, s'attardant plus encore sur l'utile que sur l’esthétique.
Cependant, sa volonté de préserver sa frimousse de tout héritage d'un combat a considérablement laissé son corps exposé. À l'instar d'un bouquin aux pages noircies d'encres, la peau blanche du bougre est couverte de balafres racontant toute une histoire plus ou moins glorieuse, souvent peu rutilante d'ailleurs.
La cicatrice dont Aslan s'amuse à inventer une histoire différente chaque fois qu'il est interrogé sur le sujet est sans conteste la plus effroyable d'entre toutes. La délicate marque prend racine entre ses omoplates pour venir mourir sur sa fesse droite rebondit, comme la gauche. Nul dimorphisme pour la carcasse ambulante du blondinet.
Au combat, l'important c'est de ne pas crever !
Quand vient le moment de faire parler les poings ou l'acier, on ne peut décidément pas affirmer qu'Aslan est un guerrier élégant. Distribuant des mandales lourdes, coup de tronches et autres fourchettes directement dans les mirettes sans oublier l'indémodable pointard dans les valseuses, il tient bien plus du chien fou que du paladin, un bagarreur. Pareille une arme à la main. Loin de posséder les bottes les plus académiques dans son arsenal, il conserve toutefois quelques atouts bien dissimulés au chaud dans sa manche, de quoi surprendre un adversaire pédant un peu trop aventureux. En résumé, un combattant peu esthétique ne reculant devant aucun coup bas pour obtenir la victoire, même jeter du sable dans les yeux comme n'importe quel vilain de film.
Un vrai roublard
Ses années de survie dans le monde difficile que fut le sien ont forgé le métal retord Aslan, lui octroyant une poignée d'aptitudes fort utiles. Crocheter une serrure, vol à la tire avec course-poursuite incluant une longue course, pickpocket, couper le vin avec de la piquette ou encore tricher aux cartes, ce salopard à plus d'une corde à son arc quand il est question de tromper son monde. Et si un loup reconnaît un loup quand il en voit un, l'adage s'applique aux escrocs.
Criminel ? Ça dépend.
Le mercenaire et sa morale grise lui ont plus d'une fois fait franchir la ligne séparant le légale de l'illégal. Pas assez fou pour s'en vanter, sa capacité à nager comme une carpe dans toutes les eaux lui ont permis d'acquérir des contacts plus ou moins importants dans le monde du banditisme. Que ce soit un receleur véreux, un antiquaire pas vraiment regardant sur la provenance du bien ou encore un type filant des contrats d'assassinat... Sans être un grand nom du milieu, Aslan connaît quelques loustics.
C'est du toc ?
Une année entière à cambrioler riches comme pauvres procura à Aslan la capacité pas si utile de débusquer le toc du vrai, en matière des pierres précieuses. Le poids, le goût, la solidité ou encore l'éclat, rien n'échappe à son œil expert. On ne lui fait pas à lui.
T'sais ce qu'elle te dit ma trogne ? Pas grand chose, effectivement.
Pas charismatique pour un sou quand il est question d'enflammer les foules, de rassembler les hésitants et de mener vers la victoire, l'orateur Aslan n'est vraisemblablement pas de la même fibre que les meneurs légendaires. En revanche, quand vient le temps d'agacer, de menacer ou de piquer, il est un virtuose. Toutefois, si son adversaire du soir est outrageusement plus fort, le mercenaire s'inclinera. Cependant, prenez garde quand vous irez vous soulager dans les buissons, le charognard à la rancune tenace.
Aslan massa l’arrière de son crâne avant de reporter cette même pogne sur sa barbe, tentant d’y instaurer un brin d’ordre. Brave essai, demeurant toutefois vain. Une grande inspiration fit frémir la carcasse plus si jeune du mercenaire tandis que ses yeux se rivait sur le type au sol, à demi conscient. Accompagné d’une nonchalance typique des hommes habitués à côtoyer la faucheuse, Aslan vint trifouiller dans l’une de ses poches pour y dégainer l’un de ses plaisirs coupables. Un cigare, au goût mielleux, qu’il vint loger directement dans son bec. Quel délice, songea le bougre qui l'allumait d'un geste vif, trahissant une coutume bien rodé chez le charognard. D’un roulement d’épaule, il réajusta sa posture avant de flanquer un coup de botte sur le malheureux étendu sur le sol froid de cette grange isolée, aux poutres grinçantes et aux pavés irréguliers. Le gémissement plaintif autant que craintif trahissait la survie du rejeton elfique rescapé du passage à tabac s’étant déroulée une poignée de minutes auparavant. Aslan combla la distance entre sa botte et la trogne de sa victime une nouvelle fois, déchaussant une des molaires du pauvre gus au visage boursouflé couvert de sang, salissant au passage le cuir des grolles du sans honneur. Un juron raisonna dans la salle, perturbant la douce mélodie de la pluie martelant le toit de la grange.
« C’est marrant, tu étais bien plus enclin à laisser ta baveuse faire du sport plus tôt. T'voilà taiseux, j’espère n’avoir rien fait qui puisse t'mettre à l’aise. »
Un sourire carnassier défigura la grimace du blondinet. La seule lumière projetée par la lanterne reposant sur l'un des barils vétuste renforçait les traits menaçant du mercenaire qui s'assura de l'attention de son duo, après s’être accroupi pour empoigner avec mépris la tignasse d’Iluvé, forçant ce dernier à soutenir le regard de son bourreau.
« Tu fanfaronnais, parce qu’avec tes copains, vous étiez trois, narrant moult exploits resplendissants. Et là, admire l'changement brutal, triste pitre, la gueule défigurée, souillant pitoyablement ton fut', certainement en train d’implorer qu'ta génitrice vienne t'sauver. J’me faisais souvent la r'marque d’ailleurs, la tendance qu’ont les gus à app'ler maman à la rescousse, avant d'crever. P't-être qu'ça m'semblera logique quand viendra mon tour. Quoi que, j’ose espérer passer l’arme à gauche en évitant l’agonie précédent cette fatalité. À défaut d'avoir été digne dans ma vie, j'ai l'culot de prier d'l'être au moment où le glas sonnera pour le vieux Grunwald. »
Avec dédain, Aslan tira sur son cigare avant d’en expirer la fumée par les narines, singeant un dragon courroucé, veillant sur son trésor. Il relâcha son emprise sur le chevelu en sang pour se redresser, râlant durant l’ascension, une main plaquée sur le bas de son dos.
« Putain, ça m'réussit pas l’hiver, le temps s'rafraîchit non ? M’enfin… J'vais pas faire l’égoïste et partager l'pourquoi de notre danse musclée improvisée. J’imagine qu'tu dois te d'mander c'que tu fais ici, dans la paille. Ce s'rait une bonne réflexion, mais, t’m’as toujours pas l’air bavard, un peu timide p't-être ? J'vais t’expliquer. Oh, n'crois pas qu'j’essaye d'justifier mon acte ou d'me dédouaner d'quoi qu'ce soit. Loin d'là. J'laisse la morale et les états d’âmes qu’elle implique aux aut'. Disons que… je fanfaronne d'vant ton chant du cygne pitoyable. L’apanage des abominables vainqueurs. »
À la manière d’un vieil ami retrouvant un camarade qu’il pensait perdu, Aslan se mit a évoquer avec nostalgie et mélancolie une époque révolue, retraçant lentement son existence, le chemin ayant métamorphosé un gamin insouciant en un soudard impitoyable aux dents longues.
« Au risque d'te décevoir, il n’y a rien d'extraordinaire, si c'n’est à quel point mon enfance est banale, commune à nombre de larrons dans les environs. Un classique dans l'jargon. Mais bon, vu que t'n’as pas l’air loquace, j'vais t'en réciter les grandes lignes, pour nous occuper un peu. J’ai grandi dans un'p'tite famille composée de… moi, et ma mère. P'tite, tu as vu ? Faut suivre. -Aslan fila une claque sur la joue tuméfiée de l’oreille pointue.- Donc, j’ai grandi dans les environs, au sein de cette magnifique et glorieuse cité château, chapardant durant toute ma jeunesse, des larcins ici et là, rarement accompagnés. Je bossais plutôt en soliste. J’ai récolté de sacrées tannées quand j'me suis fait choper quelques fois, comme avec le père Jourran, pour avoir craché dans sa marmite quand il avait l'dos tourné. Remarque, je l'avais pas volé celle-ci, de quoi m'rendre le cuir solide. Puis, à mes 16 ans, j’ai eu la chance de rencontrer le soleil d’une vie, une Nordique, comme moi. »
Aslan marquait une courte pause, ses iris furetant jusqu’aux combles grossier de la grange, regrettant de ne pouvoir apprécier les cieux et les étoiles s’y réfugiant.
« Yelna. Bon sang qu’elle était belle, si j'avais dû peindre le sublime, j'l'aurais pris comme modèle. Si mon père m’avait donné un cœur, c’tait elle qui l’avait fait battre. Douce, gentille, souriante et rêveuse. Alors forcément, à cet âge, tu aspires à d'grandes destinées. À l’aube d'nos dix-huit ans, on s’est tiré. Abandonner ma génitrice n'fut pas le moins du monde ardu, notre relation était.. dirons nous.. Volcanique, elle avait tendance à rapidement m’abîmer quand elle avait un coup dans l'nez, révisant ses crochets du gauche et ses balayettes sur la gargouille qui lui servait d'fiston. J’ai d’ailleurs une ou deux traces dans le dos, menfin… J'saute quelques chapitres, pour nous amener à la vingtaine, et un peu plus. Me voilà engoncée dans une armure légère, lame à la main sous le gosier d’un marchand qui incarnait le « mauvais endroit, mauvais moment » à la perfection. Ouais, pas très reluisant d'faire cracher l'pognon des honnêtes gens, mais qu'veux tu… Ce n'est pas moi qui fixe les places dans la chaîne alimentaire. C'est le grand architecte qu'il faut blâmer, j'suis qu'un danseur au milieu d'la piste. Pour changer d'musique, faut s'adresser au chef d'orchestre. »
Le mercenaire leva les mains, comme s’il était maintenu en joug par une arbalète belliqueuse, les sourcils relevés. Il inspira lourdement, dévorant inexorablement le cigare reposant entre ses lèvres.
« Et d'puis, disons qu'j'loue mes services dénués de toutes morales à ceux ayant les moyens d'se les payer. Meurtres, embuscades, vols, dégradations, intimidations, chantages et j'en passe. Bref, largement d'quoi noircir les pages de l’accusation lors de mon procès. J’ai touché à tout, surtout quand la paye était au rendez-vous. Et crois bien qu'j'n’ai aucune pitié, donzelle, marmots, aveugles, rien à foutre. La vie est dure. »
À l’aide d’une pichenette diaboliquement précise, le blondin projeta la dépouille de son cigare un peu plus loin. Le bruit d’une dague glissant hors de son fourreau retentit, ses phalanges enserrèrent le pommeau de l’arme.
« Mais tu dois te d'mander, tête de linotte, qu'cette histoire n’explique en rien ce que toi loustic, tu fous ici avec moi. Excellente interrogation. Brillante même. Laisse-moi prêter ma machette à ton intellect foisonnant. Tout à l’heure, j’ai sauté quelques lignes d'mon histoire, j'vais maintenant élucider ce mystère qui j'en suis convaincu t'empêche d'trouver l'sommeil. Quand j’ai quitté les alentours d’Havre’, avec ma belle, l'soir même, on a ronflé à la belle étoile. Tu sais, le côté romantique fougueux d'une jeune couple, poétisant devant le crépuscule. Tu d'vineras jamais… des types nous sont tombés d'ssus, des oreilles pointues comme toi. Curieux, je sais. Coïncidence, t'concernant, évidemment pas. La rencontre ne fut pas véritablement amicale, ils ont mal pris qu'j'refuse qu’ils s’amusent avec ma tendre. Du coup, ils m’ont massacré devant elle, pendant qu’ils assouvissaient leurs plus bas instincts sur ma… »
Le mercenaire retint ses mots, sa mâchoire se crispant alors, révélant la nature sensible des événements datant de plus d’une décennie. La haine fit bouillonner ses veines, les traits de sa frimousse patibulaire se durcissant instantanément à mesure qu’il s’approchait. Aslan chevaucha l’elfe, reposant bientôt à califourchon sur l’ensanglanté. D’un geste brusque, il envoya valdinguer sa dague plus loin, préférant régler cela à main nue. Ses mains d’ailleurs vinrent encercler le cou de sa victime qui gesticulait, se débattant de toute ses forces quand Aslan se mit à priver d'oxygène l'innocent. Avec ses ongles, le malheureux essayait de lacérer en vain le visage de son agresseur jubilant.
« Et ils m’ont laissé pour mort. Ou alors ils ont fait exprès d'me laisser en vie, j’en sais trop rien. J'ai dû enterrer mon cœur avec celle que j'aimais plus que l'monde le lendemain. Comme je maudis ma mémoire t'sais, je n'me souviens plus d'sa voix, chaque jour qui passe, son visage n'est plus aussi clair dans mon esprit... Si certains blâmeraient les individus, moi, je blâme l’entièreté de cette sale race dont tu fais partie. Vous n’êtes que des engeances qui, j’en suis sûr, sont l'vrai fléau de notre nation. Sale race. Depuis, j'm’évertue à constamment faire du zèle concernant vot' sale race. Reste attentif, ne meurt pas de suite, tu fais ton entrée dans mon histoire. Quand dix ans après j'suis v'nue honorer la mémoire de ma douce en dégustant un verre… et que j't’ai entendu t'pavaner dans cette auberge, parlant plus fort que tout l'monde, se gaussant des paysans, se vantant d’êt' un combattant hors du commun, un beau diable.. Sale race… Je savais que tu n'verrais pas l’aube. Pour sûr, tu étais trop costaud, j’ai dû attendre que t'sortes, que ton dos m'soit tourné et Vlan, une beigne… Tu ronfles… J’ai tapé pas mal fort, à en déformer le pommeau de ma dague. Te traîner mon salaud jusqu'ici, quelle plaie, pense à faire un régime. Mais, quand on aime, on n'compte pas, n’est ce pas ? Trop longtemps, j'suis resté endormi. Je jure d'massacrer autant que possible les vôt'. Qu’importe le prix, je vais m’assurer qu'plus jamais des scélérats comme les tiens ne côtoient mon sang. Qu'je fomente, trahisse ou qu’importe, la fin justifie les moyens. Dans cette p'tain d'vie, y’a trois types de personnes, les bergers, les moutons et les loups. Moi, j’suis un putain de renard. J'fais ce que je veux quand j'veux. Alors ta sale race va payer, par haine pure. Rien que ça, aussi simple que ça. Sale race ! »
Cela faisait en réalité plusieurs minutes que l’elfe ne s'agitait plus, que son baroud d'honneur avait pris fin, funeste fin, qui lui offrait la réponse sur l’après-vie. Un prix exorbitant pour une réponse souvent non voulue. Aslan s’acharnait, continuant de serrer de toutes ses forces la nuque du désormais mort au regard vitreux, éternisant sa sentence plus que de raison.
Après la frénésie, la raison. Dénué de remords, le mercenaire se releva, réajustant une mèche blonde d’un souffle court. Il se racla la gorge pour cracher sur sa victime un mollard écœurant rivalisant avec l’affreux de la scène s’étant déroulée dans l’étable. Théâtre morbide ne connaissant qu’une représentation, unique, lugubre.
« La prochaine fois, tu l’ouvriras moins, ta grande gueule. Pas de bol, y’aura pas de prochaine fois, tu m’as l’air fatigué, fin prêt pour un somme. »
Un rire gras secoua la carcasse du mercenaire tandis qu'il s'affairait à récupérer ses effets éparpillés aux quatre vents durant cette soirée de supplice infligé à l’elfe, rendu coupable d’avoir été bruyant. Coupable d'avoir été elfe dans le tribunal expéditif résidant dans la caboche amoral de l’humain. Juge, jury et bourreau. Aslan frappa ses mains couvertes d’hémoglobines contre ses cuisses, espérant atténuer les marques avant de les ranger dans ses poches. En sifflotant, il acheva cette mélodie morbide, hymne à la xénophobie et à la barbarie.
« C’t'une belle leçon final'ment. L’enfant rêveur que j’ai été fut transformé par les tiens, et désormais l'mort ambulant que je suis, traque les tiens, uniquement guidé par la cupidité et le désir d'vous voir poussière. J'suis pas assez fou pour penser réussir, mais chaque putain de vot' espèce que je tuerai, ce sera un tel soulagement, une délivrance d'rendre un peu de ce que vous m'avez si généreusement offert. Mon accomplissement dans cette existence morne. Après tout, chacun ses p'tits plaisirs. Pour certains, c’est la jardinerie, d’aut' la couture, moi c’est ranger ma lame dans votre dos. Bon, aller, je ne vais pas m’attarder, tu me sembles occupé à être mort. Ha… Occupé à être mort. »
Relevait-il, amusé de sa propre réflexion. Il franchit le seuil de la grange pour disparaître dans la noirceur de cette nuit à l’astre lunaire camouflé par les nuages. Du renard, il n’avait rien, du charognard, il avait tout. Un charognard errant, un urubu affamé. Bouffé ou être bouffé… Finir en repas n'était pas au programme, la semaine prochaine y'avait Poker, impossible d'être en retard.