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De silence, disait-on.
Ni une, ni deux, votre instinct prend le dessus et vous entrez par la porte déjà ouverte de l'établissement. Depuis l'encadrement, vous observez la scène et constatez deux choses : premièrement, la panique se propage et les clients remuent, criant comme si leur vie en dépendait, tandis que les employés se retrouvent démunis. Deuxièmement... Un corps gît au fond de la taverne dans une flaque de sang.
Pourtant, aucune trace d'un potentiel meurtrier. Il faut croire que le repos est cher payé, ces temps-ci.
La panique ambiante pèse sur vos épaules, les clients se réfugient dans des coins, observant chaque parcelle de parquet comme si le tueur allait surgir de l'ombre sans prévenir. Des murmures qui ne cessent, les citoyens acceptent leur sort et patientent, vous obéissant au doigt et à l'œil. Si votre présence les rassure, vous êtes persuadés qu'ils aient bien plus peur de mettre un pied en dehors de cette taverne.
Le sang du cadavre vient colorer sa cape d'un rouge écarlate, dans sa paume inerte gît une dague ensanglantée ; du sang frais, qui s'écoule sur le long de la lame jusqu'à s'épuiser à même le sol. Une odeur se dégage du cadavre, bien moins désagréable que ce à quoi vous vous attendiez ; à vrai dire, celle-ci est plutôt agréable, une fragrance semblable au lys, avec une potentielle touche d'agrumes. Vous pouvez déduire de la position du corps que ce dernier ne s'apprêtait pas à dîner ; un bras tendu en direction de la remise, le visage blême, des résidus de sueur sur son front, que de signes qui démontrent... quoi, au juste ?
Tout est encore trop flou, trop facile ; enquêtrice, l'heure est venue de faire parler vos talents d'observation. Après tout, c'est là votre métier, et votre devoir en tant que milicienne. Bientôt, vous en êtes sûre, vos collègues ne tarderaient pas à pointer le bout de leur nez. Toutefois, vous n'allez tout de même pas les attendre sans rien faire, n'est-ce pas ?
Aucune trace du meurtrier dans les parages. Une chose est sûre, celui-ci ne serait pas assez idiot pour se présenter et réitérer l'expérience aussitôt le premier crime perpétré. Petit à petit, les murmures cessent, l'accalmie bénit la salle et vous vous entendez finalement penser.
Vos yeux de lynx et ceux de Valère balaient la scène de crime, cherchent à déceler le moindre secret que vous dissimule ce corps sans vie. Sans plus attendre, vous vous émancipez du corps de votre hôte habituelle pour rejoindre celui d'un autre. Le plus proche, le plus accessible, le moins bruyant. Ses mains, humidifiées par la peur et l'appréhension, trouvent leur chemin jusqu'à ses poches. Quelques pièces, une chaîne dont le métal glacial vous surprendrait presque, mais rien de bien important. C'est un simple client, recroquevillé près d'un mur, dont la respiration saccadée et les battements irréguliers du myocarde ne vous témoignent qu'un problème cardiaque.
Votre douce Valère aura peut-être plus de chance en inspectant les mains du défunt. Ce sont des mains de combattant, mais trop peu usées pour un guerrier de première ligne. De nombreuses cicatrices intiment un nombre inconnu d'anciennes coupures, plutôt profondes. L'odeur de lys et d'agrumes se mélange à la sueur de ses paumes, quelques particules de mana voltigent autour de celles-ci. Des résidus, rien de plus ; ces mains tenaient fermement quelque chose doté de magie, il y a peu. Cela n'a rien à voir avec l'usage d'un sort quelconque. Quelques éraflures récentes, signes que l'homme s'est débattu avec panache ; en observant davantage, Valère constate quelques enfoncements dans cette paume. Cinq, plus précisément ; de tout petits trous, en forme d'étoile.
Comment a-t-il été assassiné ? Par quelle arme, et pourquoi ? Que cherchait-il à fuir ?
Tous ceux ici présents ont été témoins de cette tragédie. Le meurtrier ne peut pas être parti bien loin. Mais est-ce là la bonne piste à suivre ? La curiosité vous pique, maintenant plus que jamais.
Le sang sur cette lame échauffée par la chair du blessé est frais, sombre. Valère comprend alors que le meurtrier n'a pas pu aller bien loin, avec cette blessure. Cependant, un détail supplémentaire attire l'œil de notre chère Valère : sur la prise de l'arme se trouve un symbole gravé. Un As de Pique.
Vous libérez l'âme que vous possédiez tantôt ; celle-ci ne semble se douter de rien, et se contente de s'appuyer au comptoir, comme pour calmer ses palpitations. Vous prenez possession d'une femme ; un mental d'acier, celle-ci possède la force de ne pas s'effondrer face à une telle scène de crime. Vous vous emparez de ses pensées, de ses souvenirs, vous lui volez les pièces à conviction sans vraiment parvenir à faire le tri entre ses traumatismes et son savoir. Vous y entrevoyez des souvenirs d'enfance, le visage d'une mère décoloré par le passage de la Faucheuse, puis une silhouette. Une cape bleue, des cheveux blonds, une arme en mains. Beaucoup de sang s'écoule d'une plaie en plein ventre, presque autant que de la lame utilisée pour assassiner le pauvre homme gisant au centre de la pièce.
Il se dirige vers le fond de la taverne, en direction de la cuisine, profitant du chaos ambiant pour se faufiler sans que les employés ne se doutent de rien.
Soudain, vous reprenez conscience du moment présent.
Les doigts de Valère se faufilent curieusement dans le manteau de la victime, jusqu'à se glisser dans l'une des poches intérieures, et d'en ressortir un petit bout de papier. Ni une, ni deux, cette chère Valère déplie le mot et se met à le lire pour elle-même. Cette lettre est tâchée de sang, elle ne peut donc pas en lire le contenu total mais bien assez pour faire avancer l'enquête ; le dos de la lettre porte un sceau... similaire à celui retrouvé sur la dague. Mais cette fois-ci, ce n'est pas un As de Pique, mais un As de Cœur.
« [...] la présence d'un artefact permettant de [cette partie est tâchée par le sang du défunt]. Il vous faudra le subtiliser ; surtout, restez discrets. Les mages affiliés à l'artefact sont réputés pour être redoutables. Lorsque vous avez l'artefact en votre possession, retournez immédiatement au quartier général de la Taverne. [...] »
Le bras du défunt est tendu en direction d'une porte légèrement entrebâillée, au fond de la taverne.
Tandis que vous, chère Ombre, vous baladez en direction de l'arrière-cuisine, suivant ces traces de sang visiblement fraîches, vous ne vous préoccupez pas de ce qu'il se trame derrière vous. Votre confiance en Valère reste inébranlée jusqu'ici. Vos pas vous guident à l'intérieur de la cuisine et vous épiez chaque recoin, chaque parcelle de plancher à la recherche du blessé aux cheveux blonds.
Rien à l'intérieur, si ce n'est une traînée de sang qui mène jusqu'au dehors ; la porte de l'arrière-cuisine est grande ouverte. Vous l'avez visiblement manqué de peu...
Observatrice aguerrie, vous vous plongez dans une exploration plus en profondeur du cadavre encore chaud. Vos mains fouillent à la recherche d'un indice de plus, d'une énième réponse en attendant le retour de votre compagnon habituel. C'est en vous aventurant davantage que le bout de vos doigts effleurent un autre bout de papier usé, qu'il vous suffit de tirer pour découvrir. Une note manuscrite, écrite en vitesse et dont l'odeur est vraisemblablement teintée de sueur ; vous l'observez plus en détails...
Vos prunelles parcourent scrupuleusement chaque lettre de cette nouvelle trouvaille. Vos phalanges caressent le dos de la note et une couche supérieure attire votre regard ; vous retournez la note et trouvez une carte. Un As de Cœur aux bords abîmés, plus précisément. Soudain, alors que toute votre attention était portée sur ce bout de parchemin déchiré, un claquement - bien que peu audible - se fait entendre en direction de la pièce du fond de la taverne.
•• ƎꓤꓭWOˌꓶ
Vous avancez sans crainte à la recherche du blessé, suivant ces multiples traces ensanglantées sur les sentiers. Mais bientôt, le soleil ne brillera plus pour vous ; bientôt, il sera plus ardu de retrouver la trace du rescapé. Fort heureusement, vos pas vous guident jusqu'aux jardins de la Châtellerie ; là où les sentiers sont dégagés et assez clairs pour suivre le sang de votre proie. Vous foulez la terre, longez les premiers buissons taillés pour ce petit labyrinthe dont vous connaissez les moindres recoins.
Pas à pas, vous entrez dans ce lieu de paix aux fragrances fleuries. Vous pénétrez soudain sur une place, une statue de feuillages est érigée au beau milieu de celle-ci, et au pied de cette dernière se trouve le cadavre de celui que vous cherchiez ; un mage aux cheveux blonds, dont l'abdomen est transpercé. Les yeux vitreux, sa main repose sur son ventre et son regard est d'ores et déjà perdu dans les limbes. Toutefois, pas une seule trace de l'artefact.
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Ce fut une lutte sans merci mais j'ai finiiii aaaaaaa
Merci d'avance pour la lecture la MD et tout !!