Une cellule, aussi grise que mélancolique, un cachot plus précisément ; votre cœur se serre dès l'instant où une pensée vient vous caresser l'esprit : comment avez-vous atterri ici ?
Les murs qui vous entourent sont faits de pierre, vieillie et usée par le temps ; des courants d'air vous parviennent depuis le couloir à l'extérieur des barreaux. Une plaque de pierre horizontale vous attend à l'extrémité de la pièce, la seule chose qui vous sert de lit, visiblement. Vous y trouvez un oreiller plus ou moins confortable ainsi qu'une petite couverture, bien trop fine pour atténuer cette sensation glaciale sur votre peau.
Aucune issue.
L'éclat d'une torche à l'autre bout du couloir éclaire juste ce qu'il faut pour vous repérer dans cette pièce sinistre.
Vous êtes seule, livrée à vous-mêmes... N'y a-t-il aucun moyen de vous en sortir ?
Jusqu'à ce que vos yeux se ferment et qu'une voix résonne mielleusement à vos tympans.
Vous vous tournez subitement vers la source de cette voix ; surprise par une telle apparition soudaine, vous l'êtes d'autant plus lorsque vous constatez que la personne qui vous parle est assise sur le lit en pierre, les paumes plaquées contre la couverture et le regard tourné dans votre direction. Apeurée, ça oui, elle l'est, mais elle semble plus timide que vous ne l'êtes. Plus prudente, moins excentrique. C'est une femme aux cheveux châtains et aux traits fins, vêtue simplement - une roturière sans aucun doute. Plutôt jolie, plutôt menue ; une pauvre fille qui n'a rien à faire là, pour sûr.
Pourtant, vous jureriez sur tout ce que vous avez de plus cher qu'elle n'était pas là avant.
Et alors que vous vous apprêtiez à lui en faire part... Soudainement, sa présence vous semble naturelle. Peut-être vous trompez-vous. Peut-être avait-elle toujours été là... Oui, ce doit être ça. Vous ne l'aviez simplement pas prise en compte, trop préoccupée par votre propre présence. C'est exactement ça. Vous vous rappelez l'avoir vu quelques instants après avoir pris connaissance. Oui, voilà ! Elle a toujours été là.
Elle porte ses mains aux barreaux, l'air inquiète.
... Comment ?
Elle prononce son prénom, vous l'entendez pourtant. Mais c'est comme si ce mot ne parvenait pas à se faire une place dans votre mémoire immédiate. À peine prononcé, ce mot est déjà oublié. Aucun moyen pour vous de le retenir ; vous la regardez, décontenancée par cette situation étrange, tandis qu'elle attend une réponse de votre part. Si vous ne l'aviez pas remarqué plus tôt, vous la voyez à présent : cette prestance digne d'une Reine. Et soudain, l'air glacial qui caressait votre peau se transforme en l'enivrante chaleur d'un feu de cheminée.
Des cheveux ondulés, parfaitement entretenus et coiffés, quelques ornements décoratifs - feuilles, fleurs - sont entremêlés dans ses longueurs. Une silhouette gracieuse aux courbes féériques ; un regard de biche, plus doux que tout ce que vous ayez vu auparavant. Une peau laiteuse, une beauté divine ; elle vous laisserait bouche-bée, dans d'autres conditions. Cette femme est très certainement la plus belle créature que vous n'ayez vu en ce monde. Ses prunelles vertes émeraudes se posent alors sur vous.
Son prénom, très certainement. Un nom qui ne daigne pas s'inscrire dans votre mémoire, car une fois encore, vous l'entendez. Celui-ci est clair comme de l'eau de roche, et pourtant... Rien n'y fait. Vous l'oubliez instantanément.
Vous vous décomposez ; l'incompréhension dans votre regard est impossible à ne pas remarquer. Ainsi, elle penche la tête sur le côté et sourit légèrement. Une demi-lune sur ce visage angélique, qui sait étrangement vous réconforter en quelques fractions de seconde. Elle tend une main et récupère votre paume dans la sienne, avant de déposer son autre main sur le dessus de la vôtre. La voilà, la chaleur de ce feu de cheminée ; le contact de sa peau est on ne peut plus satisfaisant.
Une peau si douce que vous n'en rêveriez pas mieux. Une bienveillance sans pareille. Chaque mot qui s'échappe de ses lèvres est un filet de miel s'écoulant sur vos peurs ; elle adoucit l'angoisse, répare votre cœur meurtri par le temps et le décor froid de ce cachot. Un rayon de soleil, voilà comme vous la décririez.
Elle tente de vous réconforter, emprisonnant votre main entre ses paumes chaleureuses. Le vert de ses prunelles pétille comme tant d'étoiles dans le ciel, une nuit d'été. Sa voix est semblable à cette brise caressant votre nuque lorsque vous dormez à la belle étoile. Elle possède cette aura que seule une mère peut avoir envers son enfant ; vous êtes en sécurité.
Elle repose délicatement votre paume et dresse l'échine, prête à investiguer plus en détails la cellule dans laquelle vous vous trouvez. Elle se retourne brièvement et commence à toucher les murs, à les longer comme pour trouver une faille dans cet enfer. Elle se tourne doucement vers vous, intriguée.
Vous vous détournez alors des barreaux et commencez à vous intéresser à l'intérieur de la cellule.
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